Jules Grévy et la Franche-Comté

Le 7 janvier 2025, Anthony Soares, doctorant à l’université de Franche-Comté, a présenté ses travaux sur Jules Grévy (1807-1891) devant une cinquantaine d’adhérents de l’association « Renaissance du Vieux Besançon ». Seul président de la République française originaire de Franche-Comté, Jules Grévy resta durant toute sa vie très attaché à la Franche-Comté, et particulièrement à Mont-sous-Vaudrey (Jura). Il existe néanmoins peu de liens entre lui et Besançon.

Élu député du Jura à plusieurs reprises, président de l’Assemblée nationale (1871-1873) puis de la Chambre des députés (1876-1879), il avait une influence certaine, comme le prouve une lettre de recommandation écrite en 1873 pour le journaliste Adolphe Chevassus. Élu président de la République française le 30 janvier 1879 en Congrès à Versailles, il permit à la république de s’affirmer. Pour la protéger des ambitions de futurs présidents, il fit une déclaration restée célèbre, diminuant de facto le pouvoir du président : « Soumis avec sincérité à la grande loi du régime parlementaire, je n’entrerai jamais en lutte contre la volonté nationale, exprimée par ses organes constitutionnels. » Selon l’historien Adrien Dansette et son livre L’Affaire Wilson et la chute du Président Grévy, publié en 1936, il « continua à toucher les indemnités de représentation sans représenter et les indemnités de voyages sans voyager. » D’après les dernières recherches, il semblerait que Jules Grévy eut pourtant un rôle important dans la pacification des relations internationales, condition à l’affirmation de la république à l’intérieur du pays. Il oeuvra en père de la république. Il endossa aussi ce rôle de président de la République à Mont-sous-Vaudrey, puisqu’il fit de ce village un petit centre politique à la fin du XIXe siècle. Des ministres en exercice vinrent à Mont-sous-Vaudrey. Ses obsèques dans cette commune en septembre 1891 furent également un événement relayé dans de nombreux pays étrangers, par la presse.
L’arrivée de Jules Grévy à la présidence de la République constitua aussi une opportunité pour de nombreux Francs-Comtois, à l’image d’Albert Grévy, un de ses frères. La ligne ferroviaire Dole-Poligny fut une infrastructure utile pour plusieurs Jurassiens. Les richesses acquises par Jules Grévy permirent à des habitants de Mont-sous-Vaudrey d’en bénéficier, par des emplois notamment.
Aujourd’hui, Jules Grévy est oublié à l’échelle nationale. Plusieurs indicateurs furent développés pour le démontrer. Quelques hommages lui sont néanmoins rendus en Franche-Comté : rues, établissements scolaires… Il convient de rappeler que Jules Grévy cristallisa quelques oppositions durant ses mandats présidentiels (beaucoup voulaient que le premier président républicain soit décrédibilisé). Le scandale politico-financier des décorations fut une véritable mort politique pour Jules Grévy, contraint de démissionner le 2 décembre 1887. Un regain d’intérêt pour cette figure politique complexe semble exister, notamment dans le Jura. Le livre du sénateur du Jura Pierre Jeambrun, Jules Grévy ou la République debout, en est un exemple. Publié pour le centenaire du décès du président (1991), cet ouvrage constitue la première grande biographie sur Jules Grévy, malgré les nombreuses limites de ce travail. Après les commémorations du bicentenaire de sa naissance en 2007 à Mont-sous-Vaudrey, c’est précisément dans cette commune jurassienne qu’un intérêt semble se développer autour de Jules Grévy. La thèse entreprise par Anthony Soares en 2022, sous la direction de Jean-Paul Barrière, avec pour sujet « le président de la République française Jules Grévy, un père de la République oublié » en est l’illustration la plus récente.

Anthony SOARES