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Publié le 9 avril 2025
L’Institut supérieur des Beaux arts (ISBA) à Besançon

article rédigé par © J.BOURGUET
Si l’on emprunte la route de Gray, les promeneurs longent un immeuble longiligne surmontésde formes triangulaires ouvrant sur de larges baies vitrées faisant entrer la lumière.
Un sigle ISBA rue Denis Papin marque l’entrée qui se poursuit par un porche permettant d’accéder à un espace paysager.

Photo ISBA

Photo M.Bouvot
Quelques dates :
- 1756 Philippe Boiston propose à l’intendant Bourgeois de Boynes, de créer un cours de dessin et de sculpture à Besançon. Deux salles du Palais Granvelle sont réservées pour des cours qui commencèrent en 1756.
- 1872 L’école est transférée dans les bâtiments de la Halle aux marchés place Labourey (de la Révolution) rejointe plus tard par le Conservatoire de musique.
- 1957 Après diverses réorganisations, le directeur de l’école, Claude Dodane crée une section d’esthétique industrielle de renommée nationale. Il est donc envisagé la création d’une nouvelle école dans des locaux modernes sous l’impulsion du maire Jean Minjoz. Un premier projet à la Citadelle va échouer.
- 1963 Un terrain est trouvé par la mairie entre la nouvelle faculté de Sciences, le campus de la Bouloie et une zone d’activité et d’industrie créant ainsi une synergie entre la recherche et l’application.
- 1967 Un deuxième projet est imaginé par l’architecte Boucton mais au vu de son coût il est remis en cause. Claude Dodane va alors faire appel à un architecte catalan Lluis Sert en 1967. Ce dernier est l’auteur notamment de la fondation Maeght (1964) à Saint Paul de Vence et de la fondation Miro à Barcelone (1975). Lluis Sert va travailler avec Charlotte Perriand chargée d’animer la section design à Besançon. Des rectifications vont être apportées au projet par la municipalité. Mais les architectes Boucton et Sert ne pourront dialoguer ni s’entendre.
- 1975 L’inauguration du 16 mai se déroule en l’absence des deux architectes, L Sert ayant refusé que son nom apparaisse. Deux tranches de construction vont s’enchaîner, l’ensemble des ateliers puis le bâtiment administratif, l’auditorium, … La réception définitive a lieu en mai 1975.
Le bâtiment est inscrit au patrimoine architectural remarquable du XXe siècle.
Le bâtiment
L’ensemble couvre une surface d’environ 7000 m2. Le bâtiment comporte de nombreuses salles de cours, une importante bibliothèque, qui permettent à l’école d’offrir des formations de qualité mais également d’accueillir les publics autour d’un travail de sensibilisation et de pratiques.
L’institut organise des cours du soir et des cours périscolaires dans diverses disciplines. Une importante collection de moulages, souvent d’antiques, a été récupérée.


La notice du Ministère de la Culture décrit le bâtiment :
« L’ensemble, construit en béton, est agencé autour de patios et de courettes. Les différents bâtiments abritent des ateliers et des salles de cours pour les sections d’enseignement, un laboratoire photographique, deux amphithéâtres, une bibliothèque, des bureaux et le logement du directeur. L’entrée de l’école sous un auvent, donne accès à une cour qui distribue les différentes fonctions. Le grand amphithéâtre polygonal de 250 places ferme cette cour à l’ouest. A l’est les ateliers collectifs et les salles de cours sont distribués par une rue intérieure sur deux niveaux couverte d’une verrière. Elle est rythmée par la succession des trois patios. Les courettes donnant sur l’extérieur séparent les ateliers conçus comme des volumes indépendants, ils sont toutefois reliés au reste de l’école par des circulations secondaires. Les bâtiments sont éclairés par des toits en sheds, ainsi que par des baies sur les patios et le parc extérieur. Ces ouvertures sont habillés de brise-soleils en béton préfabriqué »
Le projet architectural


Une déambulation dans les couloirs et les salles permet de retrouver l’influence des architectes qui ont marqué la construction.
Les années 30 vont voir émerger une réflexion nouvelle à travers les idées du Bauhauss dirigé par W.Gropius, H.Meyer, Mies van der Rohe. C’est un courant artistique concernant, notamment, l’architecture, les arts appliqués, le design. Ce mouvement posera les bases de la réflexion de l’architecture moderne. En 1933 le Bauhaus (installé à Berlin) est mis en cause et fermé par les nazis,
Le CIAM 1933 (Congrès international d’architecture moderne) débouche sur la Charte d’Athènes qui va déterminer le type idéal de l’établissement humain, la planification des villes avec les notions de zonage.. Ces concepts ont été largement adoptés par les urbanistes dans leurs efforts pour reconstruire les villes européennes après la seconde guerre mondiale ( Firminy-Vert , Dresde, plan Voisin pour Paris…)
Lluis Sert (1902 / 1983) est un architecte catalan.
En 1926, il se rend à Paris pour étudier le travail de Le Corbusier avec qui il collabore. Ses premiers projets font référence à la luminosité espagnole et méditerranéenne avec la prédominance de blanc et une profusion de lumière. Il pratique un esthétisme rationaliste, marqué par l’absence d’ornementation avec des lignes épuréesqu’il introduit pour la première fois en Espagne. Il préside le CIAM de 1947 à 1956.
Charlotte Perriand (1903 / 1999)
Au salon des décorateurs de 1926 et de 1927, elle expose du mobilier d’intérieur utilisant notamment le métal, le verre, le « bois de violette ». Elle intègre l’atelier de Le Corbusier-Pierre Jeanneret puis le quitte. Elle invente un mobilier moderne en révolutionnant l’habitat intérieur pour rendre l’espace fonctionnel et modulable. Elle crée en 1928/29 l’union des artistes modernes (UAM) et enseigne à l’école des Beaux Arts de Besançon après guerre. Elle œuvre pour la reconnaissance du design comme un art majeur.
Le Corbusier (1887 /1965)
Dans l’esprit de la Charte d’Athènes, il crée une « cité-jardin verticale », construction sur pilotis d’un ensemble de logements individuels insérés dans une structure collective conçue comme un laboratoire pour un nouveau “système d’habitat”. Diverses « cités radieuses » voient le jour en France (Marseille, Firminy…) dans les années 50. Les logements en duplex bénéficient à la fois du soleil et des services nécessaires en débouchant sur des rues intérieures avec des commerces divers, des services de restauration, une école, une piscine (Marseille), conduisant à une une nouvelle pratique de l’habitat collectif .
L’architecture de l’ISBA retrouve certaines des idées de ses concepteurs avec des lignes épurées, l’absence d’ornementation, une circulation intérieure par un grand couloir sur lequel débouche les salles de cours, la bibliothèque…avec un éclairage naturel zénital et vertical faisant largement entrer la lumière, la prédominance de la couleur blanche.



Une cinquantaine d’adhérents a pu bénéficier de la visite de ce bâtiment relativement méconnu sur le plan architectural, témoin des idées nouvelles développées dans les années 30/40.
Merci à Elodie Méreau, responsable de l’action culturelle à l’ISBA, qui nous a fait déambuler dans ce bâtiment.